Leconte de Lisle est un poète français, né le 22 octobre 1818 à Saint-Paul sur l'île de la Réunion et mort le 17 juillet 1894 à Voisins (Louveciennes).
Poèmes barbares
La Mort du Soleil
Le vent d’automne, aux bruits lointains des mers pareil,
Plein d’adieux solennels, de plaintes inconnues,
Balance tristement le long des avenues
Les lourds massifs rougis de ton sang, ô soleil !
La feuille en tourbillons s’envole par les nues ;
Et l’on voit osciller, dans un fleuve vermeil,
Aux approches du soir inclinés au sommeil,
De grands nids teints de pourpre au bout des branches nues.
Tombe, Astre glorieux, source et flambeau du jour !
Ta gloire en nappes d’or coule de ta blessure,
Comme d’un sein puissant tombe un suprême amour.
Meurs donc, tu renaîtras ! L’espérance en est sûre.
Mais qui rendra la vie et la flamme et la voix
Au cœur qui s’est brisé pour la dernière fois ?
Jules Laforgue, né à Montevideo le 16 août 1860 et mort dans le 7e arrondissement de Paris le 20 août 1887, est un poète français symboliste. Connu pour être un des inventeurs du vers libre, il mêle, en une vision pessimiste du monde, mélancolie, humour et familiarité du style parlé.
Petites misères d’octobre
Octobre m’a toujours fiché dans la détresse ;
Les Usines, cent goulots fumant vers les ciels….
Les poulardes s’engraissent
Pour Noël.
Oh ! qu’alors, tout bramant vers d’albes atavismes,
Je fonds mille Icebergs vers les septentrions
D’effarants mysticismes
Des Sions !….
Car les seins distingués se font toujours plus rares ;
Le légitime est tout, mais à qui bon ma cour ?
De qui bénir mes Lares
Pour toujours ?
Je ferai mes oraisons aux Premières Neiges ;
Et je crierai au Vent : » Et toi aussi, forçat !
Et rien ne vous allège
Comme ça.
(Avec la Neige, tombe une miséricorde
D’agonie ; on a vu des gens aux coeurs de cuir
Et méritant la corde
S’en languir.)
Mais vrai, s’écarteler les lobes, jeu de dupe….
Rien, partout, des saisons et des arts et des dieux,
Ne vaut deux sous de jupe,
Deux sous d’yeux.
Donc, petite, deux sous de jupe en oeillet tiède,
Et deux sous de regards, et tout ce qui s’ensuit….
Car il n’est qu’un remède
A l’ennui.
Automne par les grands peintres
- James Tissot (1836-1902)
Automne