Juana de Ibarbourou (1892-1979) poétesse uruguayenne
Le Figuier
Parce qu’il est rugueux et laid
parce que toutes ses branches sont grises,
j’ai pitié pour le figuier.
Dans ma villa il y a cent beaux arbres :
pruniers ronds
droits citronniers
et orangers aux bourgeons lustrés.
Au printemps,
tous se couvrent de fleurs
autour du figuier.
Et le pauvre semble si triste
avec ses branches tordues qui jamais
ne s’ornent de bourgeons serrés.
Alors,
chaque fois que je passe à ses côtés
je dis, en procurant
à mon accent la douceur et l’allègresse :
"C’est le figuier, le plus beau
des arbres de mon jardin."
S’il m’écoute,
s’il comprend la langue que je parle,
quelle douceur si profonde se nichera
dans sa sensible âme d’arbre !
Et peut être la nuit,
quand le vent évente sa palme,
engourdi de joie, le figuier lui raconte :
"Aujourd’hui l’on m’a dit que j’étais beau."
***
La Higuera
Porque es áspera y fea,
porque todas sus ramas son grises,
yo le tengo piedad a la higuera.
En mi quinta hay cien árboles bellos:
ciruelos redondos,
limoneros rectos
y naranjos de brotes lustrosos.
En las primaveras,
todos ellos se cubren de flores
en torno a la higuera.
Y la pobre parece tan triste
con sus gajos torcidos que nunca
de apretados capullos se visten…
Por eso,
cada verz que yo paso a su lado,
digo, procurando
hacer dulce y alegre mi acento:
-Es la higuera el más bello
de los árboles en el huerto.
Si ella escucha,
si comprende el idioma en que hablo,
¡qué dulzura tan honda hará nido
en su alma sensible de árbol!
Y tal vez a la noche,
cuando el viento abanique su copa,
embriagada de gozo, le cuente:
-Hoy a mi me dijeron hermosa.
NarimCrafts