Château de ma présence
Anne Sylvestre (1934) - auteur interprète
Je t’aime
Ce sont bien les mots les plus doux
Comme deux bras autour du cou
Comme un grand rayon de soleil
Ce sont des mots… merveille
Ce sont des mots légers légers
Un papillon qui vient voler
Pour faire plaisir à une fleur
Ce sont des mots… douceur.
Ce sont des mots tout ronronnants
Comme le chat quand il est content
Comme le duvet d’un poussin
Ce sont des mots … câlin
Ce sont des mots qui tiennent chaud
Comme la laine sur le dos
Comme une lampe dans le noir
Ce sont des mots… espoir
Ce sont des mots qu’on peut garder
Dans son cœur toute la journée
On peut les dire et les redire
Ce sont des mots … sourire
Ce sont les mots les plus précieux
C’est la prunelle de tes yeux
Tu n’entendras jamais les mêmes
écoute bien : Je t’aime.
Marceline Desbordes-Valmore,
née à Douai le 20 juin 1786 et morte à Paris le 23 juillet 1859,
est une poétesse française.
La Reconnaissance
Romances
Hélas ! Que je dois à vos soins !
Vous m’apprenez qu’il est perfide,
Qu’il trompa mon amour timide :
C’est vous qui le jurez du moins...
Hélas ! Que je dois à vos soins !
Pressez votre main sur mon cœur
Et jouissez de votre ouvrage.
Le malheur me rend le courage ;
Mais pour juger de sa rigueur,
Pressez votre main sur mon cœur !
Adieu donc ma félicité !
Adieu sa présence et ma vie !
Oh ! Que vous m’avez bien servie
En me disant la vérité !
Adieu donc ma félicité !
Vous avez voulu me guérir,
Cruelle ! ... Ah ! Pardon ! Je m’égare.
Non, non, vous n’êtes point barbare ;
Je le crois, dussé-je mourir...
Vous avez voulu me guérir !
Marceline Desbordes-Valmore,
née à Douai le 20 juin 1786 et morte à Paris le 23 juillet 1859,
est une poétesse française.
Un moment
Un moment suffira pour payer une année ;
Le regret plus longtemps ne peut nourrir mon sort.
Quoi ! L'amour n'a-t-il pas une heure fortunée
Pour celle dont, peut-être, il avance la mort ?
Une heure, une heure, amour ! Une heure sans alarmes,
Avec lui, loin du monde ! Après ce long tourment,
Laisse encor se mêler nos regards et nos larmes ;
Et si c'est trop d'une heure... un moment ! Un moment !
Vois-tu ces fleurs, amour ? C'est lui qui les envoie,
Brûlantes de son souffle, humides de ses pleurs ;
Sèche-les sur mon sein par un rayon de joie,
Et que je vive assez pour lui rendre ses fleurs !
Une heure, une heure, amour ! Une heure sans alarmes,
Avec lui, loin du monde ! Après ce long tourment,
Laisse encor se mêler nos regards et nos larmes ;
Et si c'est trop d'une heure... un moment ! Un moment !
Rends-moi le son chéri de cette voix fidèle :
Il m'aime, il souffre, il meurt, et tu peux le guérir !
Que je sente sa main, que je dise : " C'est elle ! "
Qu'il me dise : " Je meurs ! " alors, fais-moi mourir.
Une heure, une heure, amour ! Une heure sans alarmes,
Avec lui, loin du monde ! Après ce long tourment,
Laisse encor se mêler nos regards et nos larmes ;
Et si c'est trop d'une heure... un moment ! Un moment !
Marceline Desbordes-Valmore,
née à Douai le 20 juin 1786 et morte à Paris le 23 juillet 1859,
est une poétesse française.
À Délie
« Toi, dont jamais les larmes »
Toi, dont jamais les larmes
N’ont terni la beauté,
Enveloppe tes charmes,
Enchaîne ta gaîté ;
Que ta grâce divine ,
Sous un voile de deuil,
S’abandonne et s’incline
Sur le bord d’un cercueil !
Quitte cette guirlande
Qui pare tes attraits ;
Laisse-la pour offrande
A ce jeune cyprès :
C’est ici le mélange
Des rosés et des pleurs ;
C’est l’asile d’un ange :
Qu’il dorme sous des fleurs !
Vois-tu, sous l’herbe tendre,
Ce précoce tombeau ?
Là mon cœur vient attendre
Qu’on en creuse un nouveau.
Oui, mon fils ! l’arbre sombre
Qui se penche vers toi,
En te gardant son ombre,
Croîtra bientôt sur moi !
Toi, dont jamais les larmes
N’ont terni la beauté ,
Ne voile plus tes charmes,
Rappelle ta gaîté.
Adieu, belle Délie ;
Je te rends au plaisir ;
Retourne vers la vie,
Et laisse-moi mourir.
Marceline Desbordes-Valmore,
née à Douai le 20 juin 1786 et morte à Paris le 23 juillet 1859,
est une poétesse française.
Son image
Elle avait fui de mon âme offensée ;
Bien loin de moi je crus l'avoir chassée :
Toute tremblante, un jour, elle arriva,
Sa douce image, et dans mon coeur rentra :
Point n'eus le temps de me mettre en colère ;
Point ne savais ce qu'elle voulait faire ;
Un peu trop tard mon coeur le devina.
Sans prévenir, elle dit : "Me voilà ?
"Ce coeur m'attend. Par l'Amour, que j'implore,
"Comme autrefois j'y viens régner encore. "
Au nom d'amour ma raison se troubla :
Je voulus fuir, et tout mon corps trembla.
Je bégayai des plaintes au perfide ;
Pour me toucher il prit un air timide ;
Puis à mes pieds en pleurant, il tomba.
J'oubliai tout dès que l'Amour pleura
Paul Marie Verlaine
est un poète français, né à Metz le 30 mars 1844 et mort à Paris le 8 janvier 1896.
Admirateur de Baudelaire, il s'essaie à la poésie et publie son premier recueil, Poèmes saturniens en 1866
A la louange de Laure et de Pétrarque
Chose italienne où Shakspeare a passé
Mais que Ronsard fit superbement française,
Fine basilique au large diocèse,
Saint-Pierre-des-Vers, immense et condensé,
Elle, ta marraine, et Lui qui t'a pensé,
Dogme entier toujours debout sous l'exégèse
Même edmondschéresque ou francisquesarceyse,
Sonnet, force acquise et trésor amassé,
Ceux-là sont très bons et toujours vénérables,
Ayant procuré leur luxe aux misérables
Et l'or fou qui sied aux pauvres glorieux,
Aux poètes fiers comme les gueux d'Espagne,
Aux vierges qu'exalte un rhythme exact, aux yeux
Epris d'ordre, aux coeurs qu'un voeu chaste accompagne.
Paul Marie Verlaine
est un poète français, né à Metz le 30 mars 1844 et mort à Paris le 8 janvier 1896.
Admirateur de Baudelaire, il s'essaie à la poésie et publie son premier recueil, Poèmes saturniens en 1866
Tu fus une grande amoureuse
Tu fus une grande amoureuse
À ta façon, la seule bonne
Puisqu'elle est tienne et que personne
Plus que toi ne fut malheureuse,
Après la crise de bonheur
Que tu portas avec honneur.
Oui, tu fus comme une héroïne,
Et maintenant tu vis, statue
Toujours belle sur la ruine
D'un espoir qui se perpétue
En dépit du Sort évident,
Mais tu persistes cependant !
Pour cela, je t'aime et t'admire
Encore mieux que je ne t'aime
Peut-être, et ce m'est un suprême
Orgueil d'être meilleur ou pire
Que celui qui fit tout le mal,
D'être à tes pieds tremblant, féal !
Use de moi, je suis ta chose ;
Mon amour va, ton humble esclave,
Prêt à tout ce que lui propose
Ta volonté dure et suave,
Prompt à jouir, prompt à souffrir,
Prompt vers tout, hormis pour mourir !
Mourir dans mon corps et mon âme,
Je le veux si c'est ton caprice.
Quand il faudra que je périsse
Tout entier, fais un signe, femme,
Mais que mon amour dût cesser ?
Il ne peut que s'éterniser.
Jette un regard de complaisance,
Ô femme forte, ô sainte, ô reine,
Sur ma fatale insuffisance
Sans doute à te faire sereine :
Toujours triste du temps fané,
Du moins, souris au vieux damné.
Paul Verlaine
est un poète français, né à Metz le 30 mars 1844 et mort à Paris le 8 janvier 1896.
Admirateur de Baudelaire, il s'essaie à la poésie et publie son premier recueil, Poèmes saturniens en 1866
C'est l'extase langoureuse,
C'est l'extase langoureuse,
C'est la fatigue amoureuse,
C'est tous les frissons des bois
Parmi l'étreinte des brises,
C'est, vers les ramures grises,
Le choeur des petites voix.
O le frêle et frais murmure !
Cela gazouille et susurre,
Cela ressemble au cri doux
Que l'herbe agitée expire...
Tu dirais, sous l'eau qui vire,
Le roulis sourd des cailloux.
Cette âme qui se lamente
En cette plainte dormante,
C'est la nôtre, n'est-ce pas ?
La mienne, dis, et la tienne,
Dont s'exhale l'humble antienne
Par ce tiède soir, tout bas ?