3 janvier 2021 7 03 /01 /janvier /2021 15:32

 

Epiphanie - La marche des rois -

paroles Alphonse Daudet

 


La Marche des rois ou La marche des Rois mages ou encore, en provençal, La Marcho di Rèi est un chant de Noël populaire d’origine provençale célébrant l’Épiphanie et les Rois mages. Sa reprise par Georges Bizet pour son Arlésienne en a popularisé le thème.

La Marche des Rois est un des thèmes de l’ouverture de l’Arlésienne (1872), musique de scène composée par Georges Bizet pour un drame à sujet provençal d’Alphonse Daudet.


 

De bon matin,

J'ai rencontré le train

De trois grands Rois qui allaient en voyage,

De bon matin,

J'ai rencontré le train

De trois grands Rois dessus le grand chemin.

 

Venaient d'abord des gardes du corps,

Des gens armés avec trente petits pages,

Venaient d'abord des gardes du corps

Des gens armés dessus leur juste au corps.

 

Puis sur un char,

Doré de toute part,

On voit trois rois modestes comme d'anges

Puis sur un char,

Doré de toute part

Trois rois debout parmi les étendards.

 

L'étoile luit

Et les Rois conduit,

Par longs chemins,

Devant une pauvre étable,

L'étoile luit

Et les Rois conduit,

Par longs chemins devant l'humble réduit.

 

De bon matin,

J'ai rencontré le train

De trois grands Rois qui allaient en voyage,

De bon matin,

J'ai rencontré le train

De trois grands Rois dessus le grand chemin.
 

Epiphanie - La marche des rois - paroles Alphonse Daudet
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3 janvier 2021 7 03 /01 /janvier /2021 15:29

 

 

Epiphanie - La marche des rois  (1894) -

première version française

 

 

La Marche des rois ou La marche des Rois mages ou encore, en provençal, La Marcho di Rèi est un chant de Noël populaire d'origine provençale célébrant l'Épiphanie et les Rois mages. *

 

 


La marche des rois  (1894)

 

Ce matin,

J'ai vu dans le lointain,

Frémir au vent des banderoles claires

 

Ce matin, 

J'ai vu dans le lointain

Venir des gens vêtus de frais satin.

 

Sur leurs habits, 

Perles et rubis 
Partout de l'or aux harnais des dromadaires

 

Sur leurs habits, 

Perles et rubis, 

Turbans de soie et casques bien fourbis !

 

Trois grands rois 

Modestes tous les trois 

Brillant chacun comme un soleil splendide 

 

Trois grands rois 

Modestes tous les trois 

Étincelaient sur leurs blancs palefrois. 

 

Le plus savant 

Chevauchait devant 

Mais chaque nuit, une étoile d'or les guide 

 

Le plus savant 

Chevauchait devant 

J'ai vu flotter sa longue barbe au vent.

 

M'approchant 

Je pus entendre un chant 

Que seul chantait un page à la voix franche 

 

M'approchant 

Je pus entendre un chant 

Ah ! qu'il était gracieux et touchant ! 

 

Où vont les trois

Magnifiques rois ?

Voir un enfant qui naîtra dans une crèche, 

 

Où vont les trois

Magnifiques rois ?

Fêter celui qui doit mourir en croix.
 

Epiphanie - La marche des rois  (1894) - première version française
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1 février 2020 6 01 /02 /février /2020 17:20

Francis Jammes né à Tournay (Hautes-Pyrénées) le 2 décembre 1868 et mort à Hasparren (Pyrénées-Atlantiques) le 1er novembre 1938, est un poète, romancier, dramaturge et critique français. Il passa la majeure partie de son existence dans le Béarn et le Pays basque, principales sources de son inspiration.


Poème pour la chandeleur

 

L'église habillée de feuilles

......


Purification

Par l’âne et par le bœuf, par l’ombre et par la paille,
Par la pauvresse à qui l’on dit qu’elle s’en aille,
Par les nativités qui n’eurent sur leurs tombes
Que les bouquets du givre aux ailes de colombes ;
Par la vertu qui lutte et celle qui succombe :
Je vous salue, Marie.

 

 Invention de Notre Seigneur au Temple

Par votre modestie offrant des tourterelles,
Par le vieux Siméon pleurant devant l’autel,
Par la prophétesse Anne et par votre mère Anne,
Par l’obscur charpentier qui courbé sur sa canne,
Suivait avec douceur les petits pas de l’âne :
Je vous salue, Marie.
.....
 

 

Présentation de Jesus au Temple

Présentation de Jesus au Temple

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9 juin 2019 7 09 /06 /juin /2019 22:34

Sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix (Édith Stein) (1891-1942), carmélite, martyre, copatronne de l'Europe
À l’aube du 7 août, un convoi de 987 juifs parti en direction d’Auschwitz. Ce fut le 9 août 1942, que soeur Thérèse-Bénédicte de la Croix (Édith Stein), avec sa soeur Rose et de nombreux autres membres de son peuple, mourut dans les chambres à gaz d'Auschwitz.

 

 

Poésie de Pentecôte  - 1942

 

Qui es-tu, douce lumière qui me combles
et illumines les ténèbres de mon coeur?
Tu me guides comme la main d’une mère,
et si tu me lâchais,
je ne pourrais plus faire un seul pas.
Tu es l’espace
qui enveloppe mon être et l’abrite en toi.
Abandonné de toi, il sombrerait dans le gouffre du néant
d’où tu l’as tiré pour l’élever vers la lumière.
Toi, plus proche de moi
que je ne le suis de moi-même,
plus intime que le tréfonds de mon âme,
et cependant insaisissable et ineffable,
au-delà de tout nom.
Esprit Saint, Amour Éternel!

 

N’es-tu pas la douce manne
qui du coeur du Fils
déborde dans le mien,
la nourriture des anges et des bienheureux?
Lui qui s’est relevé de la mort à la vie
m’a éveillée moi aussi du sommeil de la mort à une vie nouvelle.
Et jour après jour
il continue de me donner une nouvelle vie,
dont un jour la plénitude m’inondera tout entière,
vie issue de ta vie, oui, toi-même,
Esprit Saint, Vie éternelle!

Pentecôte

Pentecôte

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9 juin 2019 7 09 /06 /juin /2019 22:31

Sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix (Édith Stein) (1891-1942), carmélite, martyre, copatronne de l'Europe

"C'est votre intérêt que je parte ; car si je ne pars pas, le Paraclet ne viendra pas vers vous"

 

 

Poésie de Pentecôte

 

Qui es-tu, douce lumière qui me combles
 et illumines la ténèbre de mon cœur ?...
Es-tu le Maître d'œuvre,
le bâtisseur de la cathédrale éternelle
qui depuis la terre s'élève jusqu'au Ciel ?
Tu donnes vie à ses colonnes, qui se dressent,
hautes et droites, solides et immuables (Ap 3,12).
Marquées du signe du Nom divin et éternel,
elles s'élancent vers la lumière et portent la coupole
qui achève et couronne la sainte cathédrale,
ton œuvre qui embrasse l'univers entier :
Saint Esprit, Main de Dieu créatrice !...

 

Es-tu le doux cantique de l'amour
et du respect sacré qui retentit sans fin
autour du trône de la Trinité sainte (Ap 4,8),
symphonie où résonne
la note pure donnée par chaque créature ?
Le son harmonieux,
l'accord unanime des membres et de la Tête (Col 2,19),
dans lequel chacun au comble de la joie
découvre le sens mystérieux de son être
et le laisse jaillir en cri de jubilation,
rendu libre
en participant à ton propre jaillissement :
Saint Esprit, jubilation éternelle !

Pentecôte

Pentecôte

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21 avril 2019 7 21 /04 /avril /2019 00:54

Paul Verlaine est un écrivain et poète français du xixe siècle, né à Metz (Moselle) le 30 mars 1844 et mort à Paris le 8 janvier 1896 (à 51 ans).

 


Lundi de Pâques


I.

“Mon Dieu m’a dit : ” Mon fils, il faut aimer. Tu vois
Mon flanc percé, mon coeur qui rayonne et qui saigne,
Et mes pieds offensés que Madeleine baigne
De larmes, et mes bras douloureux sous le poids

 

De tes péchés, et mes mains ! Et tu vois la croix,
Tu vois les clous, le fiel, l’éponge, et tout t’enseigne
A n’aimer en ce monde amer où la chair règne,
Que ma Chair est mon Sang, ma parole et ma voix.

 

Ne t’ai-je pas aimé jusqu’à la mort moi-même,
O mon frère en mon Père, ô mon fils en l’Esprit,
Et n’ai-je pas souffert, comme c’était écrit ?

 

N’ai-je pas sangloté ton angoisse suprême
Et n’ai-je pas usé la sueur de tes nuits,
Lamentable ami qui me cherches où je suis ? ”

 

II.

J’ai répondu : ” Seigneur, vous avez dit mon âme.
C’est vrai que je vous cherche et ne vous trouve pas.
Mais vous aimer ! Voyez comme je suis en bas,
Vous dont l’amour toujours monte comme la flamme.

 

Vous, la source de paix que toute soif réclame,
Hélas ! voyez un peu tous mes tristes combats !
Oserai-je adorer la trace de vos pas,
Sur ces genoux saignants d’un rampement infâme ?

 

Et pourtant je vous cherche en longs tâtonnements,
Je voudrais que votre ombre au moins vêtit ma honte,
Mais vous n’avez pas d’ombre, ô vous dont l’amour monte,

 

O vous, fontaine calme, amère aux seuls amants
De leur damnation, ô vous toute lumière,
Sauf aux yeux dont un lourd baiser tient la paupière ! ”

 

(Sagesse,II,4)

Giotto (1266-1337), La Résurrection, Chapelle Scrovegni, Padoue, vers 1305

Giotto (1266-1337), La Résurrection, Chapelle Scrovegni, Padoue, vers 1305

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21 avril 2019 7 21 /04 /avril /2019 00:42

Marie Noël, nom de plume de Marie Rouget, née le 16 février 1883 à Auxerre et morte le 23 décembre 1967 dans cette même ville, est une poétesse française.
Le procès en béatification de la servante de Dieu a été ouvert, le 23 décembre 2017, par l'Église catholique, à la cathédrale d'Auxerre, à l'occasion du 50e anniversaire de sa mort.

Recueil : "Les Chansons et les Heures"

 

 

Chant de Pâques


Alleluia ! Fais, ô soleil, la maison neuve !
Mes soeurs, que chacune se meuve
Avec des mains de ménagère et des doigts gais…
C’est Pâques ! Jetons hors les poussières obscures,
Frottons de sable fin les clefs et les serrures,
Pour que la porte s’ouvre en paix.

 

Cirons doux, cirons vif les battants des armoires,
La fenêtre en rit dans leurs moires !
Frottons ! qu’elle se mire au luisant du parquet.
Vêtons-lui ses rideaux de fraîche mousseline…
Quel ouvrage ! A-t-on cuit le gâteau d’avelines
Et mis sur la table un bouquet ?

 

Alleluia ! Nous avons fini d’être mortes,
De jeûner, de fermer nos portes,
Le coeur clos et gardé par les effrois pieux.
Le prêtre a délivré la flamme et les eaux folles,
Notre âme sort et s’amuse dans nos paroles
Et notre jeunesse en nos yeux.

 

Ouvre tout grand la porte à la Semaine Sainte.
Mon coeur en moi sautille et tinte
Ainsi qu’une clochette en or vif qui se tut
Et s’en revient de Rome après les temps mystiques
Me donner l’envolée et le ton des cantiques
Pour l’allégresse du salut.

 

Mais avec ma corbeille il faut que je m’en aille
Chercher les oeufs frais dans la paille…
Aux vignes d’alentour ont fleuri les crocus
En rondes d’or et tenant leurs mains verdelettes
J’ai vu dans les fossés des nids de violettes
Et des coucous sur les talus.

 

Les poules ont pondu très loin dans la campagne.
Dans le matin qui m’accompagne ?
Venez-vous-en seul avec moi, mon bien-aimé…
Quelle parole avant d’y penser ai-je dite ?
Où donc est ce bien-aimé-là, dis, ma petite ?
Qui d’un tel nom as-tu nommé ?

 

Est-ce Jésus, ô moi qui ne connais point d’homme ?
Le Dieu martyr que dans son somme
Hier nous avons veillé toute la nuit au coeur,
Pleurant d’amour sur son tombeau, de deuil voilées ?
Est-ce le Printemps doux et ses graines ailées
Qui nous a soufflé dans le coeur ?

 

Mon bien-aimé, ce n’est qu’un mot, ce n’est personne.
Mais de l’avoir dit je frissonne
Et je suis parfumée et je suis en rumeur
Comme une fiancée au roi qui l’aime offerte,
Je frémis et me sens comme la terre, ouverte
Toute grande aux pieds du semeur.

 

Quel germe au loin flottant va me voler dans l’âme ?
Quel est le grain qu’elle réclame
Pour être avec les fleurs une fleur de l’été
Et pour porter des fruts quand passera l’automne ?…
Il est doux, invisible et léger, il chantonne
A travers le vent enchanté.

 

Qu’est-ce que le Printemps, ô Jésus, mon doux Maître ?
L’Ange des révoltes peut-être
Qui change d’un regard et la terre et les eaux
Pour me séduire et m’agite neuve et rebelle,
- Moi qui devrais vous être une calme chapelle-
Ainsi que l’herbe et les rameaux.

 

Ah ! de lui maintenant pourras-tu me défendre ?
O Christ, il te fallait l’attendre
Sur ta croix de salut tous les jours sans guérir
Et me faire couler sur le coeur, de tes plaies,
Ton sang, pour que cherchant tes épines aux haies,
A tes pieds j’adore mourir.

 

Mais ce matin que l’Ange a remué la pierre,
O Toi debout dans la lumière,
Ressuscité de l’aube aux pieds couleur du temps,
Toi qui dans le jardin as rencontré Marie
Que feras-tu, jardinier de Pâques fleuries,
Pour me défendre du Printemps ?

 

1907
 

 Marie Noël (1883-1967) - poète - chant de Pâques
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16 avril 2019 2 16 /04 /avril /2019 00:03

Victor Hugo est un poète, dramaturge, prosateur, romancier et dessinateur romantique français, né le 26 février 1802  à Besançon et mort le 22 mai 1885 à Paris.

Il est considéré comme l'un des plus importants écrivains de langue française. Il est aussi une personnalité politique et un intellectuel engagé qui a eu un rôle idéologique majeur et occupe une place marquante dans l'histoire des lettres françaises au XIXe siècle, dans des genres et des domaines d’une remarquable variété.

 


Extrait du livre : "Notre-Dame de Paris"

 

Tous les yeux s’étaient levés vers le haut de l’église. Ce qu’ils voyaient était extraordinaire. Sur le sommet de la galerie la plus élevée, plus haut que la rosace centrale, il y avait une grande flamme qui montait entre les deux clochers avec des tourbillons d’étincelles, une grande flamme désordonnée et furieuse dont le vent emportait par moments un lambeau dans la fumée. Au-dessous de cette flamme, au-dessous de la sombre balustrade à trèfles de braise, deux gouttières en gueules de monstres vomissaient sans relâche cette pluie ardente qui détachait son ruissellement argenté sur les ténèbres de la façade inférieure. À mesure qu’ils approchaient du sol, les deux jets de plomb liquide s’élargissaient en gerbes, comme l’eau qui jaillit des mille trous de l’arrosoir. Au-dessus de la flamme, les énormes tours, de chacune desquelles on voyait deux faces crues et tranchées, l’une toute noire, l’autre toute rouge, semblaient plus grandes encore de toute l’immensité de l’ombre qu’elles projetaient jusque dans le ciel. Leurs innombrables sculptures de diables et de dragons prenaient un aspect lugubre. La clarté inquiète de la flamme les faisait remuer à l’œil. Il y avait des guivres qui avaient l’air de rire, des gargouilles qu’on croyait entendre japper, des salamandres qui soufflaient dans le feu, des tarasques qui éternuaient dans la fumée. Et parmi ces monstres ainsi réveillés de leur sommeil de pierre par cette flamme, par ce bruit, il y en avait un qui marchait et qu’on voyait de temps en temps passer sur le front ardent du bûcher comme une chauve-souris devant une chandelle.

 

Sans doute ce phare étrange allait éveiller au loin le bûcheron des collines de Bicêtre, épouvanté de voir chanceler sur ses bruyères l’ombre gigantesque des tours de Notre-Dame.

Notre-Dame de Paris en flammes

Notre-Dame de Paris en flammes

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15 avril 2019 1 15 /04 /avril /2019 23:29

Jules Pierre Théophile Gautier, né à Tarbes le 30 août 1811 et mort à Neuilly-sur-Seine le 23 octobre 1872, est un poète, romancier et critique d'art français.

Recueil : La comédie de la mort (1838).

 

 

 

Notre Dame

 


I

 

Las de ce calme plat où d'avance fanées, 
Comme une eau qui s'endort, croupissent nos années ; 
Las d'étouffer ma vie en un salon étroit, 
Avec de jeunes fats et des femmes frivoles, 
Echangeant sans profit de banales paroles ; 
Las de toucher toujours mon horizon du doigt.

 

Pour me refaire au grand et me rélargir l'âme, 
Ton livre dans ma poche, aux tours de Notre-Dame ; 
Je suis allé souvent, Victor, 
A huit heures, l'été, quand le soleil se couche, 
Et que son disque fauve, au bord des toits qu'il touche, 
Flotte comme un gros ballon d'or.

 

Tout chatoie et reluit ; le peintre et le poète 
Trouvent là des couleurs pour charger leur palette, 
Et des tableaux ardents à vous brûler les yeux ; 
Ce ne sont que saphirs, cornalines, opales, 
Tons à faire trouver Rubens et Titien pâles ; 
Ithuriel répand son écrin dans les cieux.

 

Cathédrales de brume aux arches fantastiques ; 
Montagnes de vapeurs, colonnades, portiques, 
Par la glace de l'eau doublés, 
La brise qui s'en joue et déchire leurs franges, 
Imprime, en les roulant, mille formes étranges 
Aux nuages échevelés.

 

Comme, pour son bonsoir, d'une plus riche teinte, 
Le jour qui fuit revêt la cathédrale sainte, 
Ébauchée à grands traits à l'horizon de feu ; 
Et les jumelles tours, ces cantiques de pierre, 
Semblent les deux grands bras que la ville en prière, 
Avant de s'endormir, élève vers son Dieu.

 

Ainsi que sa patronne, à sa tête gothique, 
La vieille église attache une gloire mystique 
Faite avec les splendeurs du soir ; 
Les roses des vitraux, en rouges étincelles, 
S'écaillent brusquement, et comme des prunelles, 
S'ouvrent toutes rondes pour voir.

 

La nef épanouie, entre ses côtes minces, 
Semble un crabe géant faisant mouvoir ses pinces, 
Une araignée énorme, ainsi que des réseaux, 
Jetant au front des tours, au flanc noir des murailles, 
En fils aériens, en délicates mailles, 
Ses tulles de granit, ses dentelles d'arceaux.

 

Aux losanges de plomb du vitrail diaphane, 
Plus frais que les jardins d'Alcine ou de Morgane, 
Sous un chaud baiser de soleil, 
Bizarrement peuplés de monstres héraldiques, 
Éclosent tout d'un coup cent parterres magiques 
Aux fleurs d'azur et de vermeil.

 

Légendes d'autrefois, merveilleuses histoires 
Écrites dans la pierre, enfers et purgatoires, 
Dévotement taillés par de naïfs ciseaux ; 
Piédestaux du portail, qui pleurent leurs statues, 
Par les hommes et non par le temps abattues, 
Licornes, loups-garous, chimériques oiseaux,

 

Dogues hurlant au bout des gouttières ; tarasques, 
Guivres et basilics, dragons et nains fantasques, 
Chevaliers vainqueurs de géants, 
Faisceaux de piliers lourds, gerbes de colonnettes, 
Myriades de saints roulés en collerettes, 
Autour des trois porches béants.

 

Lancettes, pendentifs, ogives, trèfles grêles 
Où l'arabesque folle accroche ses dentelles 
Et son orfèvrerie, ouvrée à grand travail ; 
Pignons troués à jour, flèches déchiquetées, 
Aiguilles de corbeaux et d'anges surmontées, 
La cathédrale luit comme un bijou d'émail !

 

 

II

 

Mais qu'est-ce que cela ? Lorsque l'on a dans l'ombre 
Suivi l'escalier svelte aux spirales sans nombre 
Et qu'on revoit enfin le bleu, 
Le vide par-dessus et par-dessous l'abîme, 
Une crainte vous prend, un vertige sublime 
A se sentir si près de Dieu !

 

Ainsi que sous l'oiseau qui s'y perche, une branche 
Sous vos pieds qu'elle fuit, la tour frissonne et penche, 
Le ciel ivre chancelle et valse autour de vous ; 
L'abîme ouvre sa gueule, et l'esprit du vertige, 
Vous fouettant de son aile en ricanant voltige 
Et fait au front des tours trembler les garde-fous,

 

Les combles anguleux, avec leurs girouettes, 
Découpent, en passant, d'étranges silhouettes 
Au fond de votre œil ébloui, 
Et dans le gouffre immense où le corbeau tournoie, 
Bête apocalyptique, en se tordant aboie, 
Paris éclatant, inouï !

 

Oh ! le cœur vous en bat, dominer de ce faîte, 
Soi, chétif et petit, une ville ainsi faite ; 
Pouvoir, d'un seul regard, embrasser ce grand tout, 
Debout, là-haut, plus près du ciel que de la terre, 
Comme l'aigle planant, voir au sein du cratère, 
Loin, bien loin, la fumée et la lave qui bout !

 

De la rampe, où le vent, par les trèfles arabes, 
En se jouant, redit les dernières syllabes 
De l'hosanna du séraphin ; 
Voir s'agiter là-bas, parmi les brumes vagues, 
Cette mer de maisons dont les toits sont les vagues ; 
L'entendre murmurer sans fin ;

 

Que c'est grand ! Que c'est beau ! Les frêles cheminées, 
De leurs turbans fumeux en tout temps couronnées, 
Sur le ciel de safran tracent leurs profils noirs, 
Et la lumière oblique, aux arêtes hardies, 
Jetant de tous côtés de riches incendies 
Dans la moire du fleuve enchâsse cent miroirs.

 

Comme en un bal joyeux, un sein de jeune fille, 
Aux lueurs des flambeaux s'illumine et scintille 
Sous les bijoux et les atours ; 
Aux lueurs du couchant, l'eau s'allume, et la Seine 
Berce plus de joyaux, certes, que jamais reine 
N'en porte à son col les grands jours.

 

Des aiguilles, des tours, des coupoles, des dômes 
Dont les fronts ardoisés luisent comme des heaumes, 
Des murs écartelés d'ombre et de clair, des toits 
De toutes les couleurs, des résilles de rues, 
Des palais étouffés, où, comme des verrues, 
S'accrochent des étaux et des bouges étroits !

 

Ici, là, devant vous, derrière, à droite, à gauche, 
Des maisons ! Des maisons ! Le soir vous en ébauche 
Cent mille avec un trait de feu ! 
Sous le même horizon, Tyr, Babylone et Rome, 
Prodigieux amas, chaos fait de main d'homme, 
Qu'on pourrait croire fait par Dieu !

 

 

III

 

Et cependant, si beau que soit, ô Notre-Dame, 
Paris ainsi vêtu de sa robe de flamme, 
Il ne l'est seulement que du haut de tes tours. 
Quand on est descendu tout se métamorphose, 
Tout s'affaisse et s'éteint, plus rien de grandiose, 
Plus rien, excepté toi, qu'on admire toujours.

 

Car les anges du ciel, du reflet de leurs ailes, 
Dorent de tes murs noirs les ombres solennelles, 
Et le Seigneur habite en toi. 
Monde de poésie, en ce monde de prose, 
A ta vue, on se sent battre au cœur quelque chose ; 
L'on est pieux et plein de foi !

 

Aux caresses du soir, dont l'or te damasquine, 
Quand tu brilles au fond de ta place mesquine, 
Comme sous un dais pourpre un immense ostensoir ; 
A regarder d'en bas ce sublime spectacle, 
On croit qu'entre tes tours, par un soudain miracle, 
Dans le triangle saint Dieu se va faire voir.

 

Comme nos monuments à tournure bourgeoise 
Se font petits devant ta majesté gauloise, 
Gigantesque sœur de Babel, 
Près de toi, tout là-haut, nul dôme, nulle aiguille, 
Les faîtes les plus fiers ne vont qu'à ta cheville, 
Et, ton vieux chef heurte le ciel.

 

Qui pourrait préférer, dans son goût pédantesque, 
Aux plis graves et droits de ta robe Dantesque, 
Ces pauvres ordres grecs qui se meurent de froid, 
Ces panthéons bâtards, décalqués dans l'école, 
Antique friperie empruntée à Vignole, 
Et, dont aucun dehors ne sait se tenir droit.

 

Ô vous ! Maçons du siècle, architectes athées, 
Cervelles, dans un moule uniforme jetées, 
Gens de la règle et du compas ; 
Bâtissez des boudoirs pour des agents de change, 
Et des huttes de plâtre à des hommes de fange ; 
Mais des maisons pour Dieu, non pas !

 

Parmi les palais neufs, les portiques profanes, 
Les parthénons coquets, églises courtisanes, 
Avec leurs frontons grecs sur leurs piliers latins, 
Les maisons sans pudeur de la ville païenne ; 
On dirait, à te voir, Notre-Dame chrétienne, 
Une matrone chaste au milieu de catins !

Albert Lebourg (1849-1928) Notre Dame de Paris

Albert Lebourg (1849-1928) Notre Dame de Paris

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15 avril 2019 1 15 /04 /avril /2019 23:09

Francis Carco, nom de plume de François Carcopino-Tusoli, est un écrivain, poète, journaliste  et parolier français, né le 3 juillet 1886 à Nouméa (Nouvelle-Calédonie) et mort le 26 mai 1958 à Paris. Il est aussi connu sous le pseudonyme de Jean d'Aiguières.

 

 

Au pied des tours de Notre-Dame

 

Au pied des tours de Notre-Dame
La Seine coule entre les quais
Ah! le gai, le muguet coquet!
Qui n´a pas son petit bouquet?

 

Allons, fleurissez-vous, Mesdames,
Mais c´était toi que j´évoquais
Sur le parvis de Notre-Dame
N´y reviendras-tu donc jamais?
Voici le joli mois de mai

 

Je me souviens du bel été
Des bateaux-mouches sur le fleuve
Et de nos nuits de la Cité
Hélas! qu´il vente, grêle ou pleuve
Ma peine est toujours toute neuve
Elle chemine à mon côté

 

Dans le jardin du Luxembourg
Les feuilles tombent par centaines
Et j´entends battre le tambour
Tout en courant la prétentaine
Parmi les ombres incertaines
Qui me rappellent nos amours

 

De ma chambre, Quai aux Fleurs,
Je vois s´en aller sous leurs bâches
Les chalands aux vives couleurs
Tandis qu´un petit remorqueur
Halète, tire, peine et crache
En remontant à contrecœur
L´eau saumâtre de ma douleur

Maximilien Luce (1858-1941) Notre Dame de Paris 1900

Maximilien Luce (1858-1941) Notre Dame de Paris 1900

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