François Coppée (1842-1908) - poète
Recueil : Le cahier rouge (1892).
À un lilas.
Je vois fleurir, assis à ma fenêtre,
L'humble lilas de mon petit jardin,
Et son subtil arome qui pénètre
Vient jusqu'à moi dans le vent du matin.
Mais je suis plein d'une colère injuste,
Car ma maîtresse a cessé de m'aimer,
Et je reproche à l'innocent arbuste
D'épanouir ses fleurs et d'embaumer.
Tout enivré de soleil et de brise,
Ce favori radieux du printemps,
Pourquoi fait-il à mon cœur qui se brise
Monter ainsi ses parfums insultants ?
Ne sait-il pas que j'ai cueilli pour elle
Les seuls rameaux dont il soit éclairci ?
Est-ce pour lui chose si naturelle
Qu'en plein avril elle me laisse ainsi ?