Louis Janmot (1814-1892) peintre et poète français
Poèmes de l'âme
I-V Naissance et enfance de l'âme
I - Génération Divine
A l'instant qu'a choisi la sagesse infinie
Le néant vaincu cède et fait place à la vie :
De l'abime entr'ouvert, sombre et silencieux,
Une âme humaine monte à la clarté des cieux ;
Et le Dieu créateur, d'une ineffable ivresse,
A tressailli lui-même, et sur son cœur il presse
Comme un père l'enfant que son souffle a formé,
Et qui s'est senti vivre en se sentant aimé.
Salut, nouveau venu, qu'élève au rang de l'être
Le triple don d'aimer, de vouloir, de connaître!
Que votre voix se joigne aux célestes concerts ;
Elle manquait pour Dieu dans l'immense univers !
Contemplez, abrité sous l'ombre de ses ailes,
Du Bien, du Beau, du Vrai les sources éternelles ;
Car l'Idéal, pour vous un moment dévoilé,
Bientôt va s'obscurcir ; il faut, pauvre exilé,
Il faut, quittant le ciel, que votre ange vous mène
Par ce chemin où doit passer toute âme humaine ;
Libre de mériter, à l'heure du retour,
Un arrêt sans appel de colère ou d'amour.
Quels destins vous fera l'épreuve de la terre?
Nul n'en sait rien, sinon que l'épreuve est austère,
Que le bonheur pour l'homme est un fruit défendu,
S'il ne veut pas pleurer le ciel deux fois perdu.