4 mars 2019 1 04 /03 /mars /2019 01:06

Paul Verlaine (1844-1896)
Ecrivain poète français né à Metz

 


Clair de lune


Votre âme est un paysage choisi
Que vont charmant masques et bergamasques
Jouant du luth et dansant et quasi 
Tristes sous leurs déguisements fantasques.

 

Tout en chantant sur le mode mineur
L'amour vainqueur et la vie opportune,
Ils n'ont pas l'air de croire à leur bonheur
Et leur chanson se mêle au clair de lune,

 

Au calme clair de lune triste et beau,
Qui fait rêver les oiseaux dans les arbres
Et sangloter d'extase les jets d'eau,
Les grands jets d'eau sveltes parmi les marbres.

 

                                                       Paul Verlaine (1844-1896)

Antoine Watteau (1684-1721)

Antoine Watteau (1684-1721)

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4 mars 2019 1 04 /03 /mars /2019 00:41

Théodore de Banville (1823-1891)

 

Mascarades


Le Carnaval s'amuse! 
Viens le chanter, ma Muse, 
En suivant au hasard 
Le bon Ronsard ! 

 

Et d'abord, sur ta nuque, 
En dépit de l'eunuque, 
Fais flotter tes cheveux 
Libres de noeuds !

 

Chante ton dithyrambe 
En laissant voir ta jambe 
Et ton sein arrosé 
D'un feu rosé. 

 

Laisse même, ô Déesse, 
Avec ta blonde tresse, 
Le maillot des Keller 
Voler en l'air ! 

 

Puisque je congédie 
Les vers de tragédie, 
Laisse le décorum 
Du blanc peplum, 

La tunique et les voiles 
Semés d'un ciel d'étoiles, 
Et les manteaux épars 
A Saint-Ybars ! 

 

Que ses vierges plaintives, 
Catholiques ou juives, 
Tiennent des sanhédrins 
D'alexandrins ! 

 

Mais toi, sans autre insigne 
Que la feuille de vigne 
Et les souples accords 
De ton beau corps, 

 

Laisse ton sein de neige 
Chanter tout le solfège 
De ses accords pourprés, 
Mieux que Duprez ! 

 

Ou bien, mon adorée, 
Prends la veste dorée 
Et le soulier verni 
De Gavarni ! 

 

Mets ta ceinture, et plaque 
Sur le velours d'un claque 
Les rubans querelleurs 
Jonchés de fleurs ! 

 

Fais, sur plus de richesses 
Que n'en ont les duchesses, 
Coller jusqu'au talon 
Le pantalon ! 

 

Dans tes lèvres écloses 
Mets les cris et les poses 
Et les folles ardeurs 
Des débardeurs ! 

 

Puis, sans peur ni réserve, 
Réchauffant de ta verve 
Le mollet engourdi 
De Brididi , 

 

Sur tes pas fiers et souples 
Traînant cent mille couples, 
Montre-leur jusqu'où va 
La redowa,

 

Et dans le bal féerique, 
Hurle un rhythme lyrique 
Dont tu feras cadeau 
A Pilodo ! 

 

Tapez, pierrots et masques, 
Sur vos tambours de basques! 
Faites de vos grelots 
Chanter les flots ! 

 

Formidables orgies, 
Suivez sous les bougies 
Les sax aux voix de fer 
Jusqu'en enfer ! 

 

Sous le gaz de Labeaume, 
Hurrah! suivez le heaume 
Et la cuirasse d'or 
De Mogador ! 

 

Et madame Panache, 
Dont le front se harnache 
De douze ou quinze bouts 
De marabouts ! 

 

Au son de la musette 
Suivez Ange et Frisette, 
Et ce joli poupon, 
Rose Pompon ! 

 

Et Blanche aux belles formes, 
Dont les cheveux énormes 
Ont été peints, je crois, 
Par Delacroix ! 

 

De même que la Loire 
Se promène avec gloire 
Dans son grand corridor 
D'argent et d'or, 

 

Sa chevelure rousse 
Coule, orgueilleuse et douce ; 
Elle épouvanterait 
Une forêt. 

 

Chantez, Musique et Danse! 
Que le doux vin de France 
Tombe dans le cristal 
Oriental ! 

 

Pas de pudeur bégueule! 
Amis! la France seule 
Est l'aimable et divin 
Pays du vin ! 

 

Laissons à l'Angleterre 
Ses brouillards et sa bière! 
Laissons-la dans le gin 
Boire le spleen ! 

 

Que la pâle Ophélie, 
En sa mélancolie, 
Cueille dans les roseaux 
Les fleurs des eaux ! 

 

Que, sensitive humaine, 
Desdémone promène 
Sous le saule pleureur 
Sa triste erreur ! 

 

Qu'Hamlet, terrible et sombre 
Sous les plaintes de l'ombre, 
Dise, accablé de maux: 
" Des mots ! des mots ! " 

 

Mais nous, dans la patrie 
De la galanterie, 
Gardons les folles moeurs 
Des gais rimeurs ! 

 

Fronts couronnés de lierre, 
Gardons l'or de Molière, 
Sans prendre le billon 
De Crébillon ! 

 

C'est dans notre campagne 
Que le pâle champagne 
Sur les coteaux d'Aï 
Mousse ébloui ! 

 

C'est sur nos tapis d'herbe 
Que le soleil superbe 
Pourpre, frais et brûlants, 
Nos vins sanglants ! 

 

C'est chez nous que l'on aime 
Les verres de Bohême 
Qu'emplit d'or et de feu 
Le sang d'un Dieu ! 

 

Donc, ô lèvres vermeilles, 
Buvez à pleines treilles 
Sur ces coteaux penchants, 
Pères des chants ! 

 

Poésie et Musique, 
Chantez l'amour physique 
Et les coeurs embrasés 
Par les baisers ! 

 

Chantons ces jeunes femmes 
Dont les épithalames 
Attirent vers Paris 
Tous les esprits ! 

 

Chantons leur air bravache 
Et leur corset sans tache 
Dont le souple basin 
Moule un beau sein ; 

 

Leur col qui se chiffonne 
Sur leur robe de nonne, 
Leurs doigts collés aux gants 
Extravagants ; 

 

Leur chapeau dont la grâce 
Pour toujours embarrasse, 
Avec son air malin, 
Vienne et Berlin ; 

 

Leurs peignoirs de barège 
Et leurs jupes de neige 
Plus blanches que les lys 
D'Amaryllis ; 

 

Leurs épaules glacées, 
Leurs bottines lacées 
Et leurs jupons tremblants 
Sur leurs bas blancs ! 

 

Chantons leur courtoisie ! 
Car ni l'Andalousie, 
Ni Venise, les yeux 
Dans ses flots bleus, 

 

Ni la belle Florence 
Où, dans sa transparence, 
L'Arno prend les reflets 
De cent palais, 

 

Ni l'odorante Asie, 
Qui, dans sa fantaisie, 
Tient d'un doigt effilé 
Le narghilé, 

 

Ni l'Allemagne blonde 
Qui, sur le bord de l'onde, 
Ceint des vignes du Rhin 
Son front serein, 

 

N'ont dans leurs rêveries 
Vu ces lèvres fleuries, 
Ces croupes de coursier, 
Ces bras d'acier, 

 

Ces dents de bête fauve, 
Ces bras faits pour l'alcôve, 
Ces grands ongles couleur 
De rose en fleur, 

 

Et ces amours de race 
Qu'Anacréon, Horace 
Et Marot enchantés, 
Eussent chantés ! 

 

                          Théodore de Banville (1823-1891)

Mascarade

Mascarade

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4 mars 2019 1 04 /03 /mars /2019 00:29

Jean-Pierre Claris de Florian (1755-1794)

 


L'habit d'Arlequin


Vous connaissez ce quai nommé de la Ferraille,
Où l'on vend des oiseaux, des hommes et des fleurs.
A mes fables souvent c'est là que je travaille ;
J'y vois des animaux, et j'observe leurs moeurs.
Un jour de mardi gras j'étais à la fenêtre
D'un oiseleur de mes amis,
Quand sur le quai je vis paraître
Un petit arlequin leste, bien fait, bien mis,
Qui, la batte à la main, d'une grâce légère,
Courait après un masque en habit de bergère.
Le peuple applaudissait par des ris, par des cris.
Tout près de moi, dans une cage,
Trois oiseaux étrangers, de différent plumage, 
Perruche, cardinal, serin, 
Regardaient aussi l'arlequin.
La perruche disait : " J'aime peu son visage,
Mais son charmant habit n'eut jamais son égal.
Il est d'un si beau vert ! - Vert ! dit le cardinal ;
Vous n'y voyez donc pas, ma chère ?
L'habit est rouge assurément :
Voilà ce qui le rend charmant.
- Oh ! pour celui-là, mon compère,
Répondit le serin, vous n'avez pas raison,
Car l'habit est jaune-citron ;
Et c'est ce jaune-là qui fait tout son mérite.
- Il est vert. - Il est jaune. - Il est rouge morbleu ! "
Interrompt chacun avec feu ; 
Et déjà le trio s'irrite.
" Amis, apaisez-vous, leur crie un bon pivert ;
L'habit est jaune, rouge et vert.
Cela vous surprend fort ; voici tout le mystère :
Ainsi que bien des gens d'esprit et de savoir,
Mais qui d'un seul côté regardent une affaire,
Chacun de vous ne veut y voir
           Que la couleur qui sait lui plaire. "   

      

                        Jean-Pierre Claris de Florian (1755-1794)

 

 Antonin Ivanovitch Soungouroff (1911-1982) arlequin et les masques de carnaval

Antonin Ivanovitch Soungouroff (1911-1982) arlequin et les masques de carnaval

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3 mars 2019 7 03 /03 /mars /2019 23:55

Paul Verlaine (1844-1896)
Ecrivain poète français né à Metz

 

Pantomime


Pierrot, qui n'a rien d'un Clitandre,
Vide un flacon sans plus attendre,
Et, pratique, entame un pâté.

 

Cassandre, au fond de l'avenue,
Verse une larme méconnue
Sur son neveu déshérité.

 

Ce faquin d'Arlequin combine
L'enlèvement de Colombine
Et pirouette quatre fois.

 

Colombine rêve, surprise
De sentir un coeur dans la brise
Et d'entendre en son coeur des voix.

 

                                                        Paul VERLAINE (1844-1896)

Jean-Baptiste Oudry (1686-1755)

Jean-Baptiste Oudry (1686-1755)

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3 mars 2019 7 03 /03 /mars /2019 23:36

Paul Verlaine (1844-1896)
Ecrivain poète français né à Metz

 

Pierrot sur la lune

Pierrot

 

Ce n'est plus le rêveur lunaire du vieil air
Qui riait aux aïeux dans les dessus de porte ;
Sa gaîté, comme sa chandelle, hélas! est morte,
Et son spectre aujourd'hui nous hante, mince et clair.

 

Et voici que parmi l'effroi d'un long éclair
Sa pâle blouse a l'air, au vent froid qui l'emporte,
D'un linceul, et sa bouche est béante, de sorte
Qu'il semble hurler sous les morsures du ver.

 

Avec le bruit d'un vol d'oiseaux de nuit qui passe,
Ses manches blanches font vaguement par l'espace
Des signes fous auxquels personne ne répond.

 

Ses yeux sont deux grands trous où rampe du phosphore
Et la farine rend plus effroyable encore
Sa face exsangue au nez pointu de moribond.

 

                                                Paul VERLAINE (1844-1896)

Paul Verlaine (1844-1896) - Pierrot sur la lune
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3 mars 2019 7 03 /03 /mars /2019 23:10

Paul Verlaine (1844-1896)
Ecrivain poète français né à Metz

 

Colombine 

Léandre le sot 
Pierrot qui d’un saut 
De puce 
Franchit le buisson 
Casandre sous son 
Capuce

 
Arlequin aussi 
Cet aigrefin si 
Fantasque 
Aux costumes fous 
Ses yeux luisants sous 
Son masque. 

 

Do, mi, sol, mi, fa, 
Tout ce monde va 
Rit, chante, 
Et danse devant 
Une belle enfant 
Méchante 


Dont les yeux pervers 
Comme les yeux verts 
Des chattes 
Gardent ses appas 
En disent : A bas 
Les pattes. 

 

Eux ils vont toujours 
Fatidique cours 
Des astres 
Oh ! dis-moi vers quels 
Mornes ou cruels 
Désastres 


L’implacable enfant 
Preste et relevant 
Ses jupes 
La rose au chapeau 
Conduit son troupeau 
De dupes. 

 

                                                   Paul Verlaine

Walter Ernest Webster

Walter Ernest Webster

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3 mars 2019 7 03 /03 /mars /2019 23:05

Clowns en peinture -

Arthur Sarnoff (1912-2000)

Arthur Sarnoff (1912-2000)

Arthur Sarnoff (1912-2000)

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3 mars 2019 7 03 /03 /mars /2019 23:04

Clowns en peinture -

Arthur Sarnoff (1912-2000)

Arthur Sarnoff (1912-2000)

Arthur Sarnoff (1912-2000)

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3 mars 2019 7 03 /03 /mars /2019 23:03

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Arthur Sarnoff (1912-2000)

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Arthur Sarnoff (1912-2000)

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Arthur Sarnoff (1912-2000)

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