8 janvier 2022 6 08 /01 /janvier /2022 22:51


 

Émile Nelligan (1879-1941) poète québécois influencé par le mouvement symboliste ainsi que par les grands romantiques. 

Œuvres poétiques complètes I  

Poésies complètes 1896-1941

 

 

Soir d’hiver

 

Ah ! comme la neige a neigé !

Ma vitre est un jardin de givre.

Ah ! comme la neige a neigé !

Qu’est-ce que le spasme de vivre

À la douleur que j’ai, que j’ai !

 

Tous les étangs gisent gelés,

Mon âme est noire : Où vis-je ? Où vais-je ?

Tous ses espoirs gisent gelés :

Je suis la nouvelle Norvège

D’où les blonds ciels s’en sont allés.

 

Pleurez, oiseaux de février,

Au sinistre frisson des choses,

Pleurez, oiseaux de février,

Pleurez mes pleurs, pleurez mes roses,

Aux branches du genévrier.

 

Ah ! comme la neige a neigé !

Ma vitre est un jardin de givre.

Ah ! comme la neige a neigé !

Qu’est-ce que le spasme de vivre

À tout l’ennui que j’ai, que j’ai !…
 

Émile Nelligan (1879-1941) - poète québécois - Soir d’hiver
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8 janvier 2022 6 08 /01 /janvier /2022 22:50

 

 

Guillaume Albert Vladimir Alexandre Apollinaire de Kostrowitzky, dit Guillaume Apollinaire (1880-1918) poète et écrivain français, critique et théoricien d'art. 

Alcools, 1913

 


La blanche neige

 

Les anges les anges dans le ciel

L’un est vêtu en officier

L’un est vêtu en cuisinier

Et les autres chantent

 

Bel officier couleur du ciel

Le doux printemps longtemps après Noël

Te médaillera d’un beau soleil

D’un beau soleil

 

Le cuisinier plume les oies

Ah! tombe neige

Tombe et que n’ai-je

Ma bien-aimée entre mes bras

Guillaume Apollinaire (1880-1918) - poète et écrivain français, critique et théoricien d'art - La blanche neige
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7 janvier 2022 5 07 /01 /janvier /2022 22:33

 

 

Anna de Noailles  (1876-1933) poétesse et une romancière française d'origine roumaine,

 


L'hiver


C'est l'hiver sans parfum ni chants...

Dans le pré, les brins de verdure

Percent de leurs jets fléchissants

La neige étincelante et dure.

 

Quelques buissons gardent encor

Des feuilles jaunes et cassantes

Que le vent âpre et rude mord

Comme font les chèvres grimpantes.

 

Et les arbres silencieux

Que toute cette neige isole

Ont cessé de se faire entre eux

Leurs confidences bénévoles...

 

- Bois feuillus qui, pendant l'été,

Au chaud des feuilles cotonneuses

Avez connu les voluptés

Et les cris des huppes chanteuses,

 

Vous qui, dans la douce saison,

Respiriez la senteur des gommes,

Vous frissonnez à l'horizon

Avec des gestes qu'ont les hommes.

 

Vous êtes las, vous êtes nus,

Plus rien dans l'air ne vous protège,

Et vos coeurs tendres ou chenus

Se désespèrent sur la neige.

 

- Et près de vous, frère orgueilleux,

Le sapin où le soleil brille

Balance les fruits écailleux

Qui luisent entre ses aiguilles...
 

Anna de Noailles (1876-1933) - poétesse et une romancière française d'origine roumaine - L'hiver
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7 janvier 2022 5 07 /01 /janvier /2022 22:32

 

 

Emile Verhaeren (1855-1916) poète belge flamand, d'expression française.

Les débâcles

 


Pieusement

 

La nuit d’hiver élève au ciel son pur calice.

 

Et je lève mon coeur aussi, mon coeur nocturne,

Seigneur, mon cœur ! vers ton pâle infini vide,

Et néanmoins je sais que tout est taciturne

Et qu’il n’existe rien dont ce coeur meurt, avide ;

Et je te sais mensonge et mes lèvres te prient

 

Et mes genoux ; je sais et tes grandes mains closes

Et tes grands yeux fermés aux désespoirs qui crient,

Et que c’est moi, qui seul, me rêve dans les choses ;

Sois de pitié, Seigneur, pour ma toute démence.

J’ai besoin de pleurer mon mal vers ton silence !…

 

La nuit d’hiver élève au ciel son pur calice !
 

Emile Breton - La nuit de Noël (1892), palais des beaux-arts de Lille.

Emile Breton - La nuit de Noël (1892), palais des beaux-arts de Lille.

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7 janvier 2022 5 07 /01 /janvier /2022 22:32

 

 

Emile Verhaeren (1855-1916) poète belge flamand, d'expression française.

Les bords de la route

 


La barque

 

Il gèle et des arbres pâlis de givre clair

Montent au loin, ainsi que des faisceaux de lune ;

Au ciel purifié, aucun nuage ; aucune

Tache sur l’infini silencieux de l’air.

 

Le fleuve où la lueur des astres se réfracte

Semble dallé d’acier et maçonné d’argent ;

Seule une barque est là, qui veille et qui attend,

Les deux avirons pris dans la glace compacte.

 

Quel ange ou quel héros les empoignant soudain

Dispersera ce vaste hiver à coups de rames

Et conduira la barque en un pays de flammes

Vers les océans d’or des paradis lointains ?

 

Ou bien doit-elle attendre à tout jamais son maître,

Prisonnière du froid et du grand minuit blanc,

Tandis que des oiseaux libres et flagellant

Les vents, volent, là-haut, vers les printemps à naître ?
 

Emile Verhaeren (1855-1916) - poète belge flamand, d'expression française - La barque
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7 janvier 2022 5 07 /01 /janvier /2022 22:31

 

 

Emile Verhaeren (1855-1916) poète belge flamand, d'expression française.

 

En hiver


Le sol trempé se gerce aux froidures premières,

La neige blanche essaime au loin ses duvets blancs,

Et met, au bord des toits et des chaumes branlants,

Des coussinets de laine irisés de lumières.

 

Passent dans les champs nus les plaintes coutumières,

A travers le désert des silences dolents,

Où de grands corbeaux lourds abattent leurs vols lents

Et s’en viennent de faim rôder près des chaumières.

 

Mais depuis que le ciel de gris s’était couvert,

Dans la ferme riait une gaieté d’hiver,

On s’assemblait en rond autour du foyer rouge,

 

Et l’amour s’éveillait, le soir, de gars à gouge,

Au bouillonnement gras et siffleur, du brassin

Qui grouillait, comme un ventre, en son chaudron d’airain.
 

Ptto Dix - Randegg dans la neige avec des corbeaux

Ptto Dix - Randegg dans la neige avec des corbeaux

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7 janvier 2022 5 07 /01 /janvier /2022 22:30


 

Emile Verhaeren (1855-1916) poète belge flamand, d'expression française.

Toute la Flandre

 

 

Un village


Des murs crépis, de pauvres toits,

Un pont, un chemin de halage,

Et le moulin qui fait sa croix

De haut en bas, sur le village.

 

Les appentis et les maisons

S’échouent, ainsi que choses mortes.

Le filet dort : et les poissons

Sèchent, pendus au seuil des portes.

 

Un chien sursaute en longs abois ;

Des cris passent, lourds et funèbres ;

Le menuisier coupe son bois,

Presque à tâtons, dans les ténèbres.

 

Tous les métiers à bruit discord

Se sont lassés l’un après l’autre

Derrière un mur, marmonne encor

Un dernier bruit de patenôtres.

 

Une pauvresse aux longues mains,

Du bout de son bâton tâtonne

De seuil en seuil, par les chemins ;

Le soir se fait et c’est l’automne.

 

Et puis viendra l’hiver osseux,

Le maigre hiver expiatoire,

Où les gens sont plus malchanceux

Que les âmes en purgatoire.
 

Emile Verhaeren (1855-1916) - poète belge flamand, d'expression française - Un village
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7 janvier 2022 5 07 /01 /janvier /2022 22:29


 

Emile Verhaeren (1855-1916) poète belge flamand, d'expression française.

 


La neige


La neige tombe, indiscontinûment,

Comme une lente et longue et pauvre laine,

Parmi la morne et longue et pauvre plaine,

Froide d’amour, chaude de haine.

 

La neige tombe, infiniment,

Comme un moment –

Monotone – dans un moment ;

La neige choit, la neige tombe,

Monotone, sur les maisons

Et les granges et leurs cloisons ;

La neige tombe et tombe

Myriadaire, au cimetière, au creux des tombes.

 

Le tablier des mauvaises saisons,

Violemment, là-haut, est dénoué ;

Le tablier des maux est secoué

A coups de vent, sur les hameaux des horizons.

 

Le gel descend, au fond des os,

Et la misère, au fond des clos,

La neige et la misère, au fond des âmes ;

La neige lourde et diaphane,

Au fond des âtres froids et des âmes sans flamme,

Qui se fanent, dans les cabanes.

 

Aux carrefours des chemins tors,

Les villages sont seuls, comme la mort ;

Les grands arbres, cristallisés de gel,

Au long de leur cortège par la neige,

Entrecroisent leurs branchages de sel.

 

Les vieux moulins, où la mousse blanche s’agrège,

Apparaissent, comme des pièges,

Tout à coup droits, sur une butte ;

En bas, les toits et les auvents

Dans la bourrasque, à contre vent,

Depuis Novembre, luttent ;

Tandis qu’infiniment la neige lourde et pleine

Choit, par la morne et longue et pauvre plaine.

 

Ainsi s’en va la neige au loin,

En chaque sente, en chaque coin,

Toujours la neige et son suaire,

La neige pâle et inféconde,

En folles loques vagabondes,

Par à travers l’hiver illimité monde.
 

cimetière oublié Julius Clover

cimetière oublié Julius Clover

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6 janvier 2022 4 06 /01 /janvier /2022 23:05

 

 

Paul Verlaine (1844-1896) écrivain et poète français 

Romances sans paroles (1874)

 

 

Dans l’interminable …


Dans l’interminable

Ennui de la plaine,

La neige incertaine

Luit comme du sable.

 

Le ciel est de cuivre

Sans lueur aucune,

On croirait voir vivre

Et mourir la lune.

 

Comme des nuées

Flottent gris les chênes

Des forêts prochaines

Parmi les buées.

 

Le ciel est de cuivre

Sans lueur aucune.

On croirait voir vivre

Et mourir la lune.

 

Corneille poussive

Et vous, les loups maigres,

Par ces bises aigres

Quoi donc vous arrive ?

 

Dans l’interminable

Ennui de la plaine

La neige incertaine

Luit comme du sable.
 

Paul Verlaine  (1844-1896) - écrivain et poète français - Dans l’interminable …
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6 janvier 2022 4 06 /01 /janvier /2022 23:04

 

 

Jules Aldolphe Aimé Louis Breton (1827-1906) peintre et poète français.

Les champs et la mer, 1883


Beau soir d’hiver


La neige – le pays en est tout recouvert –

Déroule, mer sans fin, sa nappe froide et vierge,

Et, du fond des remous, à l’horizon désert,

Par des vibrations d’azur tendre et d’or vert,

Dans l’éblouissement, la pleine lune émerge.

 

A l’Occident s’endort le radieux soleil,

Dans l’espace allumant les derniers feux qu’il darde

A travers les vapeurs de son divin sommeil,

Et la lune tressaille à son baiser vermeil

Et, la face rougie et ronde, le regarde.

 

Et la neige scintille, et sa blancheur de lis

Se teinte sous le flux enflammé qui l’arrose.

L’ombre de ses replis a des pâleurs d’iris,

Et, comme si neigeaient tous les avrils fleuris,

Sourit la plaine immense ineffablement rose.
 

Jules Breton (1827-1906) - peintre et poète français - Beau soir d’hiver
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